samedi 27 juin 2009

Un livre à croquer

S’il est un livre qu’il faut avoir dans sa bibliothèque c’est bien celui-là. Pour ma part, je mis longtemps à me le procurer car l’édition était depuis longtemps épuisée en librairie. Pourtant, je savais par ouï dire que « Parler croquant » de Claude Duneton était une œuvre incontournable qui mettrait des mots sur beaucoup de notions encore abstraites à l’époque pour moi. Un jour, par internet je réussis à dénicher le trésor, et quelle ne fut pas mon illumination en ouvrant les pages de cet ouvrage paru en 1973 chez un grand éditeur parisien.
Une réédition qui vient à point
Grâce aux éditions « Lo chamin de sent Jaume », qui vient de la rééditer, vous allez à votre tour pouvoir déguster la prose alerte, ironique, et pertinente de Claude Duneton dans un « Parler Croquant » indémodable. Tout au long des pages, l’auteur explique en partant de son expérience personnelle pourquoi 14 millions d’occitanophones en 1930 ne sont plus que 1,5 millions 70 ans plus tard. Que de vexations, de renoncements, et d’humiliations il a fallu pour en arriver là. Mais l’intérêt de l’ouvrage ne s’en tient pas là, il réside également dans une étude très détaillée de la langue française, de son origine à nos jours, mettant en avant ses forces et ses faiblesses. On y trouve alors des réponses au problème actuel de l’enseignement de la langue de Voltaire. Claude Duneton fait même une comparaison inattendue et très jubilatoire entre langue occitane, française et anglaise. Bien des idées préconçues sont ainsi mises à mal. Les gens qui en seraient restées aux pensées du XIX° siècle trouveront ainsi l’occasion de faire une cure de jouvence intellectuelle et de voir sous un autre jour la question de la pérennité et de la transmission des langues régionales.
« Parler croquant », n’a pas pris une ride et sa nouvelle édition tombe à point nommé pour venir animer le débat actuel sur l’intérêt d’enseigner la langue occitane dans nos écoles.
Parler croquant Duneton, Claude Editions Chamin de Sent-Jaume (213 pages) 17.00 euros

« Lo Rulh », la mise en scène de la mémoire

Dans le cadre du programme de restitution de la collecte de la mémoire occitane du canton de Villefranche-de-Lonchat, L'Agence culturelle départementale Dordogne-Périgord en partenariat avec l'association J'aime mon canton, organise le spectacle "Lo Rulh", le Samedi 6 juin 2009 à 20h30 à la salle des fêtes de Saint-Géraud-de-Corps.
Christophe Rulh c’est un artiste qui cherche ou peut-être un chercheur qui met en scène ses découvertes. Anthropologue et musicien, élevé dans un milieu paysan où le chant en occitan était une réalité, le jeune homme se forme dès l’adolescence aux musiques actuelles. Tout en passant un doctorat en anthropologie il créé le GDRA, groupe de recherche artistique situé à Toulouse. Le but de cette association est d’affirmer des choix artistiques sonores et visuels pour la création de spectacles pluridisciplinaires. Partant du principe que la culture se fabrique de personne à personne, le « Rulh » s’attache à ce que sont les individus soient au cœur de ses créations. Pour cela le collectage lui permet de partager le regard sur l’autre au cours d’un spectacle vivant, où se mêlent le son, la radiophonie, et les images d’Amic Bedel. Et bien sûr il y a la voix et la musique du Rulh, qui mixe guitare, clarinettes, saxophones, électronique, cornemuse, et lap-top sampler d’images.
Découverte et partage
A l'interface de la recherche artistique et anthropologique chaque création qui fait suite à des résidences est une performance en plateau pour rendre la réalité humaine et valoriser les personnes collectées qui deviennent, par la magie de l’image et du son, des acteurs du spectacle. Christophe aime ainsi nous raconter des histoires, par la voix, le théâtre, et les techniques numériques du son et de l’image. Il réussit ainsi une mise en miroir entre la scène où il se trouve physiquement et l’image projetée de ses partenaires virtuels. Tout cela créé un moment très original où culture occitane d’hier forme une continuité avec celle d’aujourd’hui.

Samedi 6 juin 2009 à 20h30 à la salle des fêtes de Saint-Géraud-de-Corps
« Lo Rulh » - TARIF : 5 €

Bon anniversaire l’IEO !

Samedi 13 juin, les périgourdins sont invités sur l’esplanade du Théâtre de Périgueux à venir fêter les 40 ans de L’Institut d’Estudis Occitans. Mais l’IEO, qu’es aquò ?
Lors de la seconde guerre mondiale, nombreux furent les occitanistes qui se bâtirent dans le maquis pour libérer notre pays et la lutte contre l’occupant se fit souvent en langue d’oc. Parmi eux, une poignée d’hommes issus de la résistance créèrent en 1945 l’Institut d’Estudis Occitans. Leur but était de maintenir et de développer la langue et de la culture occitanes par la direction, l’harmonisation et la normalisation de tous les travaux qui concernaient la culture occitane dans son ensemble. Depuis l’association s’est répandue sur tout le territoire occitan y compris le Val d’Aran et les vallées occitanes d’Italie. L’un de ses grands succès fut le développement et l’acceptation de la graphie qui est aujourd’hui officiellement admise pour l’enseignement de la langue d’oc. En Dordogne, la section de l’IEO s’appelle Novelum et a accompli aux côtés du Bornat un immense travail pour que l’occitan ait sa place pleine et entière dans la vie de notre département.
Coriandre en cadeau !
Pour son 40° anniversaire, Novelum met les petits plats dans les grands. Samedi sur l’esplanade du NTP, un village occitan s’installe au cœur de la ville. Dès 14h00 il y aura des chants avec les enfants des classes bilingues et de la Calandreta. Cela sera suivi à 17h30 d’un spectacle de clown en bilingue et un apéritif sera offert en fin d’après-midi. Pour que la fête soit parfaite, le groupe Coriandre, venu pour l’occasion du Gard donnera, de 21h30 à minuit, un grand concert-baléti, à écouter et à danser. Et comme tout est gratuit, je suis sûr que vous vous laisserez séduire par cette grande journée de fête populaire en compagnie de cette belle association occitane.

Les 40 ans de Novelum (IEO Perigòrd) le samedi 13 juin 2009
Périgueux (Esplanade du Théâtre)
Renseignements : 05 53 08 76 50

vendredi 5 juin 2009

L’art de nous raconter

Être artiste en milieu rural n’est pas chose aisée. Durant les années où dans notre département le spectacle vivant se cantonnait à une expression artistique d’importation, ne voyant dans les acteurs locaux que des amateurs, c’était plus difficile encore. Et si de plus il vous prenait l’idée de vous exprimer en occitan, alors là il valait mieux plier bagage. C’est d’ailleurs ce que fit à l’époque Monique Burg qui partit à Londres se former à l'art théâtral où elle vécut onze ans. Une fois trilingue, occitan, français, anglais, et riche d’une solide expérience, la belle rousse qui rendrait jalouse bien des irlandaise est retournée sur ses terres sarladaises plein d’usage et raison.
Une artiste aux nombreuses facettes
Entre temps les choses avaient évolué au pays. Peu à peu la culture occitane avait gagnait une place dans la politique et l’action culturelle d’Aquitaine et du Périgord. Monique Burg fut au rendez-vous. A la fois conteuse, comédienne et chanteuse, cette artiste à la forte personnalité et à la voix envoûtante participa ainsi depuis quelques années à de nombreux projets. Elle fut partie prenante lors du collectage de la mémoire occitane dans le nord Dordogne. Et c’est elle que Pamela Varela a choisie pour aller à la rencontre de femmes et les faisant se raconter dans le film « las Sasons ». De même, pour le spectacle « Imaginaires », bâti autour du collectage de cinq régions d’Occitanie, elle était la conteuse qui intervenait pour le Périgord : une évidence.
S’il vous arrive de la voir sur scène, ne soyez pas surpris. Elle conte comme une conteuse traditionnelle. Elle raconte, comme une copine indiscrète. Elle vous interpelle aussi à la façon des show man actuels avec un humour meitat chen - meitat porc périgourdin à souhaits. Et il lui arrive même de chanter. Seule en scène, Monique Burg c’est tout cela à la fois et bien plus encore, un vrai bonheur tout simplement.


Monique Burg, « Ca va mal et ça dure »
Samedi 30 Mai, Lalinde, salle Jacques Brel
Organisation Tradigordines Entrée 5 euros
Renseignements: 06.81.70.98.63

Per far dançar Carnaval

Je suis de ces gens qui pensent qu’il faut être acteur de la fête et non spectateur. Rien ne m’énerve n’est plus triste que d’assister à un défilé de chars de Carnaval sans pouvoir ni chanter ni danser. Aussi si vous êtes comme moi, le Cap’oc avec l’aide de l’association Carnaval Pantalonada vient d’éditer le kit du bon petit festaire de Mardi Gras : Danças de Carnaval. Ce livre-CD est l’outil indispensable pour les professeurs de primaire et de collège, pour les animateurs de centres aérés comme pour tous les citoyens qui souhaitent s’initier au secret des chants et des danses du Carnaval d’Aquitaine.
Le livret est en trois parties. D’abord sont présentés 17 chansons en occitan à danser, avec une traduction en français. La deuxième partie présente les pas de base. Enfin viennent la mise en place et le déroulement de chaque danse dont les paroles sont proposées dans le premier tiers du livret, avec en sus 7 autres danses. Dans le coffret se trouvent également deux CD. Le premier est fait pour apprendre avec des harmonisations simples. Le second est sur un rythme normal pour pouvoir danser et faire chanter le monde.
Un outil simple et efficace
Dès la première lecture on sent que les créateurs de l’ouvrage ont la pratique d’une pédagogie active simplifiée. La méthode a été éprouvée et expérimentée sur le terrain auprès du jeune public et permet rapidement à un groupe d’apprendre à chanter et danser. C’est là l’outil idéal pour préparer les carnavals de 2010 en Périgord. Il est à noter qu’un document vidéo sera disponible en complément dans le courant de l’année sur le site Internet du Cap’oc.
Quand je vous aurai dit que la majorité des danses proposées peut également être pratiquée tout au long de l’année plus rien ne vous empêchera de vous procurer ce coffret.

Danças de Carnaval (escòlas, collègi)
CAP'ÒC/CDDP – 19.50 €
http://crdp.ac-bordeaux.fr/capoc/
cddp24, Tél : 05.53.09.85.83

L’accent qu’es aquò ?

« Des racines plein les fouilles. Innombrables. Ce n’est pas la question du nombre qui me tracasse, mais de la norme. Je l’entends. Enorme et partout. Mine de rien. A la radio, à la télé, dans nos machines et nos portables, dans la pub ou dans les répondeurs automates. Les voix du grand neutre. Tout autre chose que dans le parler des rues, des champs, des gens et de leurs visages… » C’est fort de ce préambule à l’ouvrage « Gueules de voix », qu’André Minvielle a décidé de partir entre Aveyron et Pyrénées à la rencontre des accents.
Comme un enquêteur, il nous convie à une magnifique balade qui va de l’université de Toulouse Mirail, à Laguiole en passant par les rives du Lot et les marchés d’Armagnac. Cette quête ethnolinguistique permet de reconstituer l’histoire des gens de ce pays, de comprendre comment s’est bâti le géni de cette société languedocienne riche et variée, toujours en mouvement, et comment ses accents en sont une des plus belles marques d’identité. J’ai beaucoup apprécié les portraits qui forment l’ossature du livre. J’ai appris sur le rugby, les courses de vaches, la place de la femme dans la société pyrénéenne prérévolutionnaire.
Le verbe, l’image et le son.
Vous serez comme moi séduits par l’écriture d’André Minvielle. Vivifiante et créative elle donne de la chair et du sens aux rencontres. La mise en photos de Jean-Philippe Arles est elle aussi remarquable faisant de chaque personnage croisé par Dédé Minvielle un héro du quotidien. La bonne idée est d’avoir doté l’ouvrage d’un CD où vous pourrez écouter la voix, l’accent, de tous les acteurs de cette joyeuse enquête de sens et de son.
Je regrette seulement que ce très beau voyage au cœur du Languedoc n’ait pas été étendu à l’Aquitaine. A la rencontre de tous ces gens, on sent intuitivement que notre région va bien plus loin que ses frontières administratives.
« Gueules de voix » André Minvielle,
Éditions Privat 2008. 160 p. (CD original inclus) 35 euros.

En mai la mémoire se dévoile


Il y a quelques mois je vous parlais de l’intérêt du collectage de la mémoire effectué par l’Agence Culturale Départementale sur l’ensemble du département. Aujourd’hui je vous invite à voir deux productions qui découlent de ce travail.

Samedi 16 mai, dans le cadre du dynamique Carrefour Occitan de Mussidan , l’association autour du chêne accueillera le spectacle Imaginaire. Cette création a vu le jour suite à une commande de trois Région et concerne cinq pays dont le Périgord Vert. Le résultat mêle sur scène la projection de témoignages, le conte avec Monique Burg, ainsi que la danse et le chant.
Une culture commune
Si l’un des buts avoués était de montrer la réalité d’une culture et d’une langue entre l’Armagnac, le Limousin et le Languedoc, le pari est tenu. Pendant deux heures de temps, on plonge avec Guillaume Lopez et Bernard Cauhapé au cœur d’un territoire vaste et divers mais qui tire sa cohérence de la langue occitane au travers des chants, des légendes et des vire-langue qui sont communs au peuple de ce grand sud-ouest de la France. De jeux sur les doigts en comptines le spectateur prend peu à peu conscience de vivre sur un territoire unifié par une langue plus que millénaire. Il se rend compte alors que sa culture même populaire est une richesse qu’il nous faut impérativement transmettre aux enfants de ce pays.
Pas un homme à l’écran
A Périgueux, vous aurez aussi la possibilité d’aller voir au cinéma du 13 au 18 mai « Las Sasons » de Pamela Varela. Dans ce road-movie qui fait également suite au collectage, Monique Burg, encore elle, nous mène de rencontre en rencontre au cœur d’un Périgord Vert magnifiquement filmé. Pas un homme dans le chant de la caméra, mais des femmes de 17 à 80 ans qui nous confient en occitans les bonheurs, les peines, et les amours qui ont fait leur vie. Ce docu-fiction dépeint avec tendresse et respect ces femmes de notre pays. De l’émotion pure.
Spectacle Imaginaire : Samedi 16 mai, Mussidan 21h30
– Salle Gerbeaud (tarif PLein : 8 € / tarif réduit : 5 € / gratuit -de 12 ans)
Las sasons du 13.05.2009 au 18.05.2009, Cap Cinéma, Périgueux